Un livre qui se savoure comme une tablette de chocolat
Véronique Chartier a lu « Les Orphelins de François » pour Écran et toile. Verdict : un bonheur !
Le 21 octobre 1984, le monde de beaucoup de cinéphiles s’est arrêté de tourner lorsque la nouvelle a déferlé : François Truffaut, grande figure du cinéma français et de la Nouvelle Vague est décédé. Parmi ses aficionados, le journaliste Bernard Gheur qui, des années durant, a entretenu un échange épistolaire peu commun avec le principal intéressé. Bercé dans son adolescence par les premiers films de Truffaut, admirateur discret et apprenti cinéaste, le jeune liégeois est entré de plain-pied dans l’univers du réalisateur par le biais de « Tirez sur le pianiste » et depuis, ne s’en est jamais écarté. Grâce à son ouvrage « Les orphelins de François », nous suivons ses pas, partons à la rencontre de Madeleine Morgenstern, du cinéma de François Truffaut mais aussi de ses propres souvenirs de jeunesse. Sorte de « Un jour, un destin » conjugué au pluriel, le récit de Bernard Gheur est une véritable bouffée d’air frais que l’on prend à plein poumon, un doux parfum mélancolique que l’on savoure intensément et une magnifique ode à l’amitié, à la passion du cinéma et aux quelques grands noms qui nous l’ont fait aimer.
Présentation du livre : Le 24 octobre 1984, au cimetière de Montmartre, Claude de Givray prononce l’éloge funèbre de son ami François Truffaut. « Si François n’était pas né, s’il n’avait pas été cinéaste… » Et moi, que serais-je devenu si François Truffaut n’avait pas existé ? À 16 ans, je n’aurais pas parcouru les rues de Liège une caméra à la main, ni fait la sortie des écoles de filles, en quête de jolies actrices. À 17 ans, je n’aurais pas pris le rapide Moscou-Paris de 00h10, aux Guillemins, pour découvrir un film en exclusivité, remonter les Champs-Elysées, sonner à certaines portes. À 20 ans, sans une lettre merveilleuse, sur papier pelure, postée de Paris, je ne me serais pas jeté dans l’écriture d’un roman. Et, à 39 ans, quittant mon journal un dimanche soir, après le bouclage de la dernière édition, je ne me serais pas mis à pleurer comme un enfant perdu…
L’auteur : Bernard Gheur est né à Liège en 1945. Après Le Testament d’un cancre, (Albin Michel 1970), préfacé par François Truffaut, il a publié plusieurs autres romans, dont Le Lieutenant souriant, devenu un classique de la littérature pour la jeunesse, et Les Étoiles de l’aube (Editions Weyrich 2011, Prix Marcel Thiry 2012, Prix des lycéens 2013).
Avis : Encouragé par François Truffaut à faire de sa nouvelle un roman de qualité, lu et corrigé par le scénariste et réalisateur français, Bernard Gheur a, au fil des années, suivi les conseils et impulsions amicales qui lui étaient adressés sur un papier fin signé d’une main qui a écrit de nombreux scénarios et tenu bon nombre de caméras pour nous offrir un regard sur la vie rempli d’amour et d’empathie.
Ces deux caractéristiques, on les retrouve dans « Les orphelins de François », une biographie originale dans laquelle se croisent les tendres souvenirs de son auteur mais aussi les rencontres récentes qui lui ont permis de faire vivre à nouveau le souvenir de François Truffaut.
Assis dans le salon de Madeleine Morgenstern, au cœur de l’appartement emblématique filmé à plusieurs reprises par son propriétaire, perdu dans les témoignages d’amis qu’il a pu côtoyer (parmi lesquels Claude de Givray, ami, co-scénariste et complice de Truffaut) ou dans son passé vif qu’il nous conte avec beaucoup de tendresse, Bernard Gheur nous prend par la main, avec pudeur et sympathie, passion et modestie pour nous faire vivre ses propres débuts de cinéaste, d’écrivain, de journaliste mais aussi ceux de celui qu’il a toujours admiré mais jamais rencontré.
En découvrant son enfance, nous comprenons parfaitement pourquoi le cinéma de François Truffaut l’a touché droit au cœur : les anecdotes partagées par Bernard Gheur sur sa scolarité nous font sourire autant que les petites bêtises du petit Antoine Doinel, ses premiers pas fébriles, caméra au poing et ses incalculables va-et-vient vers la ville Lumière pour approcher d’un peu plus près l’univers de celui qui l’a tant fait rêver sont autant d’occasions de nous plonger dans la vie avec un grand V et dans l’amour du cinéma que nous sommes nombreux à partager.
Livre intime et riche d’anecdotes sur la vie de « son » François, ce nouvel ouvrage se savoure comme une délicieuse tablette de chocolat, s’inscrit dans notre imaginaire et accompagne nos heures de lecture avec un bonheur certain. Car « Les orphelins de François » fleure bon la nostalgie et les embruns d’une Nouvelle Vague qui surferait bientôt sur le succès et ça, ça fait particulièrement du bien.
Véronique Chartier, Ecran et toile
« Les orphelins de François» de Bernard Gheur est disponible en librairie et sur notre e-shop :