Un livre pour raconter la Meuse

Xavier Van der Stappen, passionné des fleuves, nous emmène aux racines de l’Europe.

L’année 2020 a été prolifique pour vous… après Au Loup ! Ami ou ennemi ? paru en novembre, vous publiez un deuxième ouvrage cette année, Mémoires de Meuse, un livre de photographies commentées qui fait la part belle aux villes et aux sites mosans. Comment est né ce projet et pourquoi la Meuse ?

Il a quelques années, je parcourais la Meuse en kayak dans ce qui constitue, sans doute, le tronçon le plus étonnant géologiquement parlant, entre Anseremme et Hastière. J’ai habité à Liège où je longeais la Meuse, à vélo, jusqu’à Maastricht. Ensuite, à la faveur d’une belle rencontre, je me suis installé juste au bord de la Meuse. Mon association y a développé un prototype d’habitat autonome situé dans le no man’s land, entre la France et la Belgique. C’est un incroyable havre de paix, riche d’une incroyable biodiversité. Quand on a beaucoup voyagé, comme j’ai eu la chance de le faire durant de longues années, et qu’on décide de partager ce qu’on a devant soi, on en vient inévitablement à remonter ou à descendre le cours d’eau qu’on admire chaque jour. Les fleuves font partie de mes passions. J’ai eu l’occasion de descendre le fleuve Niger en canoë, ainsi que le fleuve Sénégal et la Gambie et de longer les côtes africaines entre Gibraltar et la Guinée Bissau. Avec la Meuse, c’est un voyage aux racines de l’Europe, une plongée dans l’Histoire.

Combien de temps a-t-il fallu pour parcourir la Meuse et certains de ses affluents, d’amont en aval appareil photo en main ? Quels sont les endroits qui vous ont le plus marqué ?

Ce safari mené sur deux années a été parcouru par tronçons successifs, avec plusieurs visites des lieux à des saisons différentes, avec de grands contrastes entre les étés caniculaires et les terribles crues qui noient les paysages. Il a fallu pousser les portes secrètes des églises oubliées et des sites archéologiques peu courus. La Meuse est un excellent terrain de découvertes qui baigne trois pays cinq départements français, deux régions belges et quatre provinces néerlandaises.

Mes coups de cœurs sont le cours sauvage du fleuve dans le département de la Meuse, les villages d’ardoise et de pierre ardennais, la vallée encaissée entre Hastière et Wépion, le parc national de Biesbosch aux Pays-Bas et l’agréable cité de Rotterdam. En fait, il y a tant d’images qui me reviennent en tête qu’un seul livre ne suffit pas à relater ce fleuve. C’est donc une sélection personnelle à laquelle j’ai du me livrer.

En quoi la Meuse constitue-t-elle un continuum culturel et historique important ? Comment les villes qu’elle traverse se sont-elles particulièrement développées et vivent-elles aujourd’hui à son contact ?

Depuis l’Antiquité, la Meuse a été d’une importance capitale en tant que voie d’échanges et frontière naturelle entre les empires, les royaumes et les états indépendants. En 1606, lorsque Charles de Gonzague, prince d’origine italienne, crée Charleville, métropole des Ardennes, c’est pour commercer, par la Meuse, avec les villes libres de la Mer du Nord !

Avant que Louis XIV ne conquière une partie de la vallée, Charles Quint possédait la plupart des places fortes et c’est sans parler de l’influence de la Principauté de Liège. La vallée fut le théâtre de conflits internationaux dont le plus meurtrier, le front de Verdun lors de la Première Guerre mondiale. Du plateau de Langres jusqu’à l’estuaire de la Meuse, en aval de Rotterdam, la vallée de la Meuse se lit comme un livre d’histoire avec une quantité étonnante de témoins du passé.

Avez-vous d’autres projets en cours ? Sur quels animaux, quelles villes ou quelles régions souhaiteriez-vous réaliser un travail d’une telle ampleur à l’avenir ?

Je prépare un livre sur l’ours, un animal incroyablement intéressant qui a connu un sort comparable à celui du loup dans nos contrées. Le loup et l’ours méritent vraiment d’être décrits plus justement, afin qu’on puisse les respecter pour ce qu’ils sont, sans en atténuer la dangerosité ou l’impact. Avec la collaboration d’un spécialiste des populations de chasseurs du cercle polaire, nous travaillons également sur un ouvrage valorisant le rôle des derniers prédateurs d’Europe.

Je prépare aussi un livre sur Arthur Rimbaud l’Ardennais. Un voyage à partir de son œuvre, relue en emboitant ses pas. Il y a quelques années, j’avais eu l’occasion de monter une exposition sur son œuvre et son séjour en Ethiopie. C’est donc un retour aux sources et une lecture personnelle de sa vie inconsciemment décrite avant d’être vécue.

Enfin, je travaille sur la réserve sénégalaise de Bandia qui constitue un réel paradis pour les amateurs d’oiseaux et les mammifères de l’Ouest africain. Le Sénégal est encore riche de diversité avec de nombreux milieux naturels tels que les étendues désertiques, la savane, les forêts galeries bordant les fleuves et la mangrove, mais aussi plusieurs ethnies animistes qui vivent dans des lieux reculés.

« Mémoires de Meuse des sources à l’embouchure » de Xavier Van der Stappen est disponible en librairie et sur notre e-shop :

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