Ode à la Gaume, par Jean Mergeai
Le cinquième volume de la collection Regains vient de paraître.
Après Francis André, Omer Marchal, Nelly Kristink et Pierre Nothomb, c’est Jean Mergeai qui est remis à l’honneur à travers la réédition de Gaume, un ouvrage haut en couleurs dans lequel l’auteur tire le portrait de sa « petite patrie » en abordant différents aspects de son histoire, de sa culture et de son folklore.
Ancien magistrat et écrivain bien connu dans le Sud Luxembourg, Jean Mergeai (1927-2006) a laissé derrière lui une œuvre littéraire abondante qui révèle tout l’attachement qu’il vouait à sa région natale, la Gaume. Ses romans, essais, nouvelles et pièces de théâtre, tant en français qu’en gaumais, vantent amoureusement le pays et le font vivre. Une œuvre et un auteur qui bénéficient aujourd’hui d’un regain d’intérêt.
Transmettre sa passion pour le pays
Dans cet ouvrage divisé en huit chapitres, Jean Mergeai livre sa vision de la Gaume en développant des thèmes justement sélectionnés. L’auteur ne se contente pas de décrire des caractères, de raconter des légendes et de peindre le folklore, mais justifie aussi sa démarche d’écriture et de réflexion tout au long du texte en rappelant le besoin vital de connaître ses racines. Il confie ses certitudes au lecteur, lui accordant ainsi le droit d’entrer dans l’intimité de sa pensée, notamment lorsqu’il conclut : « j’ai la conviction que cette étude peut nous aider, nous autres gens de Gaume restés au pays ou fixés ailleurs, à mieux nous connaître tels que nous ont faits des siècles d’ingéniosité têtue et de souriante vaillance. […] on ne bâtit rien de solide et de durable, sans préparer des fondations robustes, bien enfoncées dans le sol. »
« Chaque région a l’imaginaire qu’elle mérite »
Quand il parle de la langue gaumaise, c’est pour lui rendre hommage en montrant à quel point elle correspond à une manière de vivre, à un art de vivre, qui fut celui de la région pendant des siècles. C’est avec tendresse, mais aussi avec quelques soupirs qu’il aborde la nette baisse de vitalité de cette langue pourtant au cœur de l’identité culturelle de la Gaume, ce dont témoignent les chants gaumais qu’il fait figurer dans son livre. Lorsqu’il cite des légendes du pays, c’est le Djan d’Mâdy, héros populaire gaumais, la duchesse Mathilde de Toscane, fondatrice d’Orval et la marquise Louise de Lambertye, célèbre Dame du Pont d’Oye, qui sont entre autres mis à l’honneur. Jean Mergeai le dit, « chaque région a l’imaginaire qu’elle mérite », et la Gaume regorge de fabuleux récits où l’histoire et la légende s’emmêlent pour former un imaginaire mythique, toujours vivace, partagé et suscitant la curiosité, preuve par-dessus tout de l’existence d’une conscience, d’une identité gaumaise. À propos du boire et du manger traditionnels de Gaume, c’est de manière savoureuse qu’il nous décrit la façon dont on préparait et consommait les mets qualifiés aujourd’hui « du terroir », mais qui étaient de consommation quotidienne à l’époque. D’autres aspects, comme le travail, le folklore, les jeux… sont abordés de la même manière, avec la tendresse sincère et la nostalgie heureuse d’un amoureux de son pays. Rassuré aussi, Jean Mergeai l’est, car l’intérêt pour la culture gaumaise ne disparaît pas avec les générations, il change mais persiste.
Un livre savoureux qui ravira tant les Gaumais que leurs voisins, les uns pouvant s’y rencontrer, les autres tenter de comprendre ce qui fonde le caractère si particulier des habitants de ce petit bout de territoire de l’extrême sud de la Belgique qui, selon l’auteur, « apparaît comme la base du pays entier »…
À mettre entre toutes les mains de ceux qui ressentent non pas le mal du pays, mais la soif du pays, l’envie de découvertes et de rencontre avec soi-même.
Louis Mores
Gaume de Jean Mergeai est disponible en librairie et sur le site des éditions Weyrich.