La Foire aux humilités
Par Philippe Remy-Wilkin pour Le Carnet et les instants
Je suis entré deux fois dans Perversus, ce qui signifie que j’en suis sorti. La première fut aisée : « C’était un soir d’octobre, dans une plaine du nord, où bruissaient des rumeurs de guerre. » Dès les premières lignes, je mesure où je pose le pied. Un roman historique mais épuré, sans descriptions échevelées, digressions alambiquées. Un roman romanesque, avec un zeste de suspense, du mouvement, des personnages en trois dimensions. Un roman bien écrit, narré dans la fluidité.
Je mesure ? Oui et non. Claude Froidmont nous faufile au côté d’un officier supérieur à la veille d’une bataille décisive, vers 1746, près de Liège. Singulier. Le héros est à la fois très présent tout en demeurant dans l’ombre, énigmatique. Son nom n’est pas divulgué ni son grade. C’est un ami du maréchal français, il a un peu moins de soixante ans, porte un grand nom et une responsabilité plus grande encore : sauver un manuscrit précieux, le faire imprimer, diffuser. Or une prémonition le convainc de sa mort prochaine, il ne survivra pas à l’ultime victoire.
En route pour un thriller historico-ésotérique ? Le texte évoqué se dissimule sous un halo lumineux digne d’un Graal. Son propriétaire ne s’envisage-t-il pas comme « l’humble intercesseur d’un nouveau monde – de justice et de bonheur (…) » ? On imagine mille obstacles, mille ennemis, mille péripéties autour de la possession, du vol de ce trésor. On délire aussi quant à l’interprétation à donner au contenu des feuillets. Or…
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