David Pierson interviewé dans L’Avenir pour « Béatrice de Dante à Orval »
Béatrice, l’enfant du scandale
« David Pierson, (TVLux) s’est passionné pour la Divine Comédie de Dante et y a trouvé des révélations sulfureuses sur la fondatrice d’Orval.
D’où vous vient cette passion et cette attirance pour l’histoire de l’abbaye d’Orval ? Parce que vous êtes originaire de Florenville ?
Quand je travaillais à Bruxelles, j’ai trouvé un exemplaire d’une des éditions de l’histoire d’Orval de l’abbé Tillière chez un bouquiniste. Je me suis rendu compte qu’Orval avait traversé les siècles et bien des crises politiques ou religieuses. Et là, j’ai dû développer mes connaissances pour bien comprendre les enjeux de l’histoire où Orval était devenue pour moi une sorte de fil rouge.
Comment parvient-on à entrer dans cette œuvre immense qu’est la Divine Comédie, de Dante? Quelle a été votre méthode pour ne pas vous noyer dans les 14 233 vers écrits par le grand auteur italien et en ressortir les éléments menant à la petite Béatrice et à Orval ?
En 2011, lors du colloque historique sur les origines d’Orval, organisé par l’ASBL Aurea Vallis et Villare, on a appris que Mathilde de Toscane avait accouché dans nos régions d’une petite fille, morte très jeune, à qui elle avait donné le prénom de Béatrice. Or, dans la Divine Comédie, où Dante cherche Béatrice, le poète parle d’une “Matelda”, qu’il a volontairement rendue obscure. Chez Dante, “Matelda” est associée à une source… tout comme Mathilde dans la légende de la fondation d’Orval. J’ai donc abordé ce poème en me demandant si je n’y rencontrerais pas la célèbre abbaye.
« Personne ne détient la vérité, sauf le poète »
Votre bibliographie en fin de livre est impressionnante. Vous avez lu réellement tous ces ouvrages avant de vous atteler à l’écriture du vôtre?
(Rires) Plus encore, car il s’agit seulement d’une bibliographie sommaire où ne figurent que les ouvrages qui sont cités.
Avez-vous eu des contacts avec des spécialistes italiens de l’œuvre de Dante pendant vos recherches ? Quelle a été la réaction de tous ceux qui pensaient que la muse du poète était Bice Portinari, et non pas Mathilde de Toscane et son petit bébé Béatrice comme vous le révélez ?
Je n’ai pas eu de contact avec ces Italiens et c’était délibéré. Les avis de tous les spécialistes ne se recoupent pas. Personne n’a LA vérité, sauf le poète. À ce jour, deux spécialistes ont lu mon travail et leurs avis divergent. Pour Bice Portinari, je soupçonne Dante de l’avoir utilisée comme un bouclier laissant croire à ceux qui ne devaient pas savoir, que c’est bien d’elle dont il parle. Cette astuce du bouclier, il l’explique (mais à demi-mots) dans la Vita Nova.
La communauté des moines cisterciens d’Orval a réagi auprès de vous depuis la publication de votre ouvrage ?
Ils trouvent le contenu interpellant, mais demandent que ce contenu puisse être vérifié.
La grosse plus-value de vos recherches est d’être parvenu à démontrer que Dante cachait Orval et Béatrice dans son texte. Mais avant vous, l’historien médiéviste Paolo Golinelli a déjà révélé que les fouilles menées à Orval dès 1965 avalent permis de découvrir un petit caveau contenant des chiffons et des ossements d’un jeune enfant. Cela, vous n’en partez pas dans votre livre. Pourquoi ?
Le problème de ce petit caveau, c’est que les archéologues qui ont réétudié les comptes rendus des fouilles des années 60 n’y croient absolument pas. Pour eux, il s’agit d’un recoupement de tombe postérieur à une première inhumation, ce qui est fréquent. Et malheureusement rien ne subsiste de cette découverte.
Orval est Béatrice, la muse de Dante
David Pierson, journaliste à TVLux, aura attendu ses 53 ans et une recherche opiniâtre dans l’oeuvre complexe de Dante Alighieri, célèbre poète de Florence (1265-1321), pour publier un livre qui fera sensation.
Non pas parce qu’il révèle l’existence d’un enfant qu’aurait eu en 1070 Mathilde de Toscane, fondatrice d’Orval, une fillette décédée quelques semaines après sa naissance, mais parce qu’avec une série de documents et interprétations à l’appui, David Pierson démontre que cet enfant, Béatrice, est née de l’amour interdit entre Mathilde et son “directeur de conscience” de l’époque et conseiller spirituel, le moine Hildebrand, devenu en Italie le pape Grégoire VII. Or, le père de cette petite fille aurait dû être Godefroy le Bossu, époux de Mathilde de Canossa, mais le couple traversait alors des turbulences et vivait séparé, lui en Lotharingie, elle en Italie. David Pierson a beaucoup lu. Il a retrouvé des interventions de deux archevêques et vingt-quatre évêques au Synode de Worms, en 1076. Dans une lettre, ces prélats de l’Église reprochent au pape Grégoire VII d’avoir “mangé et cohabité avec la femme d’un autre”, qui est Mathilde de Toscane, affirme Pierson.
La grande innovation de l’auteur est d’avoir retrouvé, dans le long poème de Dante, La Divine Comédie, qu’il a passé au peigne fin, des traces, des preuves de référence à Béatrice et à l’abbaye d’Orval. “Orval a bien fait de fêter son 950e anniversaire en 2020 (1070-2020). Car dans l’œuvre de Dante, Béatrice, plusieurs fois citée, est ni plus ni moins que l’abbaye d’Orval ! Dante le fait sous une forme qu’il faut apprendre à décoder”, affirme David Pierson. Un livre qui passionnera les amateurs d’histoire, de secrets cachés et d’ésotérisme.
Vidéos, page Facebook
Le livre, 276 pages, coûte 23 €. Il est disponible dans toutes les librairies de la province et en commande sur le site de l’éditeur. Si vous le souhaitez, pour votre site internet ou votre page Facebook, trois teasers vidéo sont dispos sur la page YouTube de l’auteur : https://www.youtube.com/channel/UCR1yTCdErLOqKgxDVPERybA
D. Pierson publie aussi des liens vers les critiques sur sa page Facebook dédiée à ce livre: https://www.facebook.com/David.Pierson.auteur/ »
Un article de Dominique Zachary paru dans
l’Avenir Luxembourg le vendredi 4 décembre 2020
Petite précision de l’auteur :
Merci à Dominique Zachary pour ce compte-rendu et cette interview !
Je souhaite seulement préciser que c’est plutôt dans la perspective du mariage qui lui est imposé avec Godefroy le Bossu (probablement entre la fin de novembre et le début décembre 1069), que Mathilde aurait conçu, avec Hildebrand, la petite Béatrice. Une enfant dont elle accouche plusieurs mois après son mariage forcé. À l’automne 1071, après le décès de sa fille, Mathilde quitte son mari et rentre en Toscane. C’est seulement alors que les époux vivront séparés. Quant à Hildebrand, conseiller de six papes, il ne devient lui-même pape qu’en 1073, prenant pour nom Grégoire VII. C’est donc entre la fin de l’an 1071 et 1076 qu’interviennent les accusations de cohabitation scandaleuse mais la relation entre Mathilde et Hildebrand daterait de la fin de l’année 1069, au moins !
« Béatrice de Dante à Orval » de David Pierson est disponible en librairie et sur notre e-shop :