Alain Lallemand remporte le prix Marcel Thiry
Ce vendredi 25 octobre, votre roman Ce que le fleuve doit à la plaine a reçu le prix Marcel Thiry, l’occasion de remettre en avant ce récit fictionnel inspiré de faits réels paru dans la collection Plumes du Coq.
1. Quel accueil a été réservé à votre ouvrage ? A-t-il suscité des réactions ?
L’ouvrage a reçu d’excellentes critiques, quels que soient les media, lectrices et lecteurs, avec un enthousiasme particulier pour les scènes d’action, qu’il s’agisse des exploits équestres ou des performances de nage en eau froide, ainsi que pour la description minutieuse des paysages, la force des personnages, leur profondeur et les rebonds inattendus de l’intrigue. Il est vrai que par son thème, le lieu et l’événement historique dans lequel le récit s’inscrit, c’est un roman unique, sans précédent, qui expose pour la première fois l’impact de l’invasion russe sur les diverses populations de Crimée, notamment les Tatars, et rebondit sur les spécificités culturelles et sociales de la presqu’île pour lui donner sa force romanesque. Paradoxalement, malgré cet atout historique, c’est le premier de mes romans où la dimension littéraire est soulignée d’emblée, ainsi que les filiations et comparaisons les plus flatteuses.
2. Votre roman traite de l’invasion russe de la Crimée, un évènement que vous avez couvert en tant que journaliste. Comment cela a-t-il influencé votre travail ? Ce prix peut-il aider les lecteurs à appréhender un conflit d’actualité sous un autre angle ?
Mon travail de grand reporter m’a permis d’accéder aux lieux durant l’opération russe, d’approcher de manière privilégiée les acteurs et témoins, de comprendre les enjeux à hauteur des communautés et des hommes et femmes. Cela constitue évidemment une source abondante de profils de personnages possibles, de conflits intérieurs et conflits sociaux à la fois crédibles et hautement romanesques. Avec ces repères pris à la boussole du journaliste, le romancier avait ensuite beau jeu de constituer au fil des années d’écriture une solide documentation historique et culturelle qui étaye les inspirations littéraires. Par-delà le plaisir de lecture, les références factuelles (espace, temps, mouvements militaires, enjeux sociaux) sont scrupuleusement respectées et permettront à chacun d’enrichir son jugement sur ce conflit. Par-dessus l’épaule du romancier, il y a en permanence un journaliste qui veille à la loyauté du roman envers les faits.
3. Quel rôle joue la fiction à l’heure de relater des évènements réels aussi durs que ceux dont il est question ?
La convergence entre le journaliste et le romancier permet de respecter le réel sans se perdre dans la complexité des faits, des lieux, des dates. Par les combats très humains qu’ils mènent pour sauvegarder leurs amours, leurs amitiés, leur foyer, les personnages nous offrent une clé de lecture à la fois dépouillée, compréhensible mais très profonde d’un chaos dans lequel, sans ce fil conducteur des héroïnes et héros, l’observateur extérieur serait désorienté, noyé sous le fatras d’information. Comme polarisé par un puissant aimant (la volonté ou le destin des personnages), tous les éléments s’alignent comme par magie, deviennent compréhensibles. C’est la force pédagogique du roman.
Quant à la dureté, je me refuse aux descriptions violentes, à la complaisance glauque. Les ellipses offrent les descriptions muettes les plus puissantes.
4. Que représente ce prix pour vous ?
Une source d’infinie fierté. L’Aéro-Club de France est une véritable institution dont la création remonte à 1898. C’est la toute première institution aéronautique au monde, qui se pose depuis plus d’un siècle en mémoire vivante d’une des plus grandes aventures de l’humanité. Fidèle à une tradition remontant à 1925, l’Aéro-Club de France décerne des prix et diplômes aux meilleures œuvres littéraires récentes ayant un rapport culturel avec l’aviation. Voir mon travail récompensé d’un Prix Littéraire par un jury d’experts, qui mêle entre autre des historiens et des anciens pilotes, est une fabuleuse récompense qui m’encourage à continuer à explorer d’autres figures injustement oubliées. Ça tombe bien car je suis le point de publier, toujours chez Weyrich, une nouvelle biographie d’aviateur méconnu – Charles Goffin – le seul pilote belge de l’U.S. Air Force.
Propos recueillis par Emmeline Renier
Photo d’en-tête : © Bruno D’ALIMONTE
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